Prix de l’électricité, pourquoi ça augmente ?
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Une augmentation de presque 6 % en juin, une autre de 1,23 % en août… Mais à quoi sont dues les hausses du prix de l’électricité que nous subissons depuis le début de l’année ? On vous explique.
Faire vivre la concurrence
Fin 2018, la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) préconise au gouvernement d’augmenter les tarifs réglementés de l’électricité de 5,9 % — la plus forte hausse depuis 20 ans — à partir de mars 2019. Problème, face à la crise des Gilets Jaunes qui frappe l’Hexagone, ce dernier, qui dispose d’un délai légal de 3 mois pour se pencher sur la question, décide, d’ici là, de ne pas faire appliquer cette augmentation.
Une fois ce délai écoulé, la décision du gouvernement est publiée au Journal officiel : les tarifs réglementés de l’électricité augmenteront bien de près de 6 %, dès le 1er juin. De son côté, la CRE justifie alors cette augmentation par la nécessité d’entretenir le réseau électrique français : « la qualité de notre système électrique fait qu’on était obligé de faire cela », confiait ainsi son président, Jean-François Carenco, fin mai. Dans le même temps, le gouvernement déclarait qu’« en 2018, les prix de gros de l’électricité ont notablement augmenté en France, comme dans toute l’Europe, du fait de l’augmentation des prix des combustibles et du carbone. La hausse proposée par la CRE est du même ordre de grandeur que les hausses répercutées dans les autres pays : 8 % en Espagne et en Italie et hausse de 20 % du tarif social en Belgique ».
En réalité, si environ la moitié de cette hausse de 6 % est effectivement due à l’entretien du réseau électrique français, l’autre moitié est liée à la concurrence et au principe de « contestabilité ». Les tarifs réglementés de l’électricité sont en effet conçus pour refléter les coûts d’EDF — l’énergéticien étant en charge du bon fonctionnement du réseau —, mais aussi pour permettre aux fournisseurs alternatifs de le concurrencer, d’être compétitifs et de pouvoir proposer des tarifs inférieurs : le principe de « contestabilité ».
Or, les concurrents de l’énergéticien français, qui ont accès, à un coût fixe, à une partie de l’électricité nucléaire produite par EDF, se sont démultipliés ces dernières années, réduisant, dès lors, l’électricité disponible pour chacun. Ces derniers ont donc été contraints de se fournir sur les marchés, où les prix sont par définition plus élevés. Au total, « 40 % de l’augmentation prévue ne correspondent pas à une hausse des coûts d’EDF, mais ont pour but de permettre à ses concurrents de proposer des prix égaux ou inférieurs aux tarifs réglementés », déplorait ainsi l’Autorité de la concurrence en mars dernier.
« La moitié de la hausse n’a rien à voir avec l’augmentation des coûts d’EDF. C’est simplement que les opérateurs alternatifs n’ont pas accès autant qu’ils le voudraient au nucléaire et augmentent leurs coûts, et que donc en compensation, pour que la concurrence puisse continuer de survivre, on augmente de 6 % au lieu d’augmenter de 3 % le tarif de l’électricité d’EDF. C’est tout à fait injuste et anormal », s’indignait alors François Carlier, délégué général de l’association de consommateurs CCLV, qui a décidé d’attaquer cette augmentation devant le Conseil d’État.
Face à cette « absurdité », en avril 2019, François de Rugy, alors ministre de la Transition écologique et solidaire, avait indiqué que « le mode de calcul actuel ne nous satisfait pas : il ne permet pas de faire profiter les Français notamment du fait qu’il y a l’énergie nucléaire qui, elle, est à coûts relativement constants pour les centrales anciennes, et donc nous allons changer le mode de calcul ».
Une vingtaine de jours après l’entrée en vigueur de l’augmentation des tarifs de 6 %, la CRE annonçait qu’au 1er août, ces derniers augmenteraient une nouvelle fois, de 1,23 %. D’après celle-ci, cette nouvelle hausse aurait pour objectif de couvrir l’augmentation des tarifs rémunérant les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution de l’électricité, qui sont revus annuellement le 1er août, afin de s’adapter aux évolutions du marché et au niveau de l’inflation.
Selon une étude commandée par le régulateur belge de l’énergie (CREG) au cabinet Pwc, en 2018 — donc avant les différentes augmentations de prix survenues cette année — la France était le pays d’Europe où l’électricité était la moins chère, le consommateur français payait en effet 600 euros en moyenne par an, quand ses voisins allemands et belges déboursaient près de 1000 €. Si le prix de l’électricité française a augmenté depuis, il en a été de même dans toute l’Europe, celle-ci reste donc l’une des moins chères du Vieux Continent.