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Réglementation bancaire: l’équilibre reste à trouver

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Réglementation bancaire: l’équilibre reste à trouver

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Trop sévère pour certains, pas assez pour d’autres, la réglementation bancaire continue de faire débat. Si Bruxelles se félicite, de nombreux experts rappellent que trop de réglementation peut tuer la réglementation et les banques.

Dix ans après la crise, l’optimisme semble de mise à Bruxelles. « La stabilité financière a été considérablement renforcée ces dernières années et la réduction des risques dans le secteur bancaire de l’UE se poursuit à un rythme soutenu », se félicitait la Commission européenne en novembre, à l’occasion de la diffusion de son troisième rapport sur la réduction des risques liés aux prêts non performants. Le texte met notamment en avant « une amélioration considérable des positions de fonds propres et de liquidités des banques, une meilleure surveillance de la santé des banques et le lancement d’un processus de résolution du problème des banques en difficulté ».

Un optimisme qui ne semble toutefois pas faire l’unanimité parmi les experts. Si Olivier Pastré, président de la banque d’affaires IM Bank, membre du Cercle des économistes et professeur d’économie à l’université de Paris VIII, reconnaît les progrès considérables faits ces dernières années en matière de lutte contre les paradis fiscaux et d’exigences de fonds pour les plus grandes banques, il attire l’attention sur d’autres chantiers qui « semblent marquer le pas », comme l’encadrement réglementaire de certains marchés dérivés. Il alerte tout particulièrement sur « la nécessité d’éviter que trop de réglementations tue la réglementation, soit par contournement de celle-ci, soit par étouffement de certaines activités parmi les plus nécessaires ».

Construire un nouveau modèle

 

Un bon équilibre en matière de réglementation bancaire semble en effet à trouver. Dans une tribune au Monde, Camille Baudouin, consultante au sein du cabinet Adamantia Advisory et maître de conférences à Sciences Po et à l’EDHEC Business School, plaide pour une transformation de la contrainte réglementaire, afin d’en faire un levier stratégique pour reconstruire un modèle d’affaires. « A l’heure de la dérégulation bancaire outre-Atlantique, l’Europe, elle, poursuit sa route vers une régulation renforcée, constate l’experte. Jamais la pression réglementaire n’a été aussi forte pour les banques françaises. Ces nouvelles règles du jeu éprouvent les limites de leurs modèles économiques et doivent conduire à une remise en question ».

Pour la spécialiste, le poids réglementaire pèse de plus en plus sur la structure de coût de la banque, ce qui précipite les délocalisations, les fermetures d’agences, le gel des salaires ou encore la « démocratisation » du « flex office » (soit l’absence d’attribution d’un poste de travail précis aux salariés). Seule solution : au lieu de se limiter à intégrer les exigences des régulations, les banques devraient utiliser la contrainte réglementaire « comme levier pour se réinventer » et saisir ainsi « l’opportunité de construire un nouveau modèle autour de la réglementation et en dégager un avantage concurrentiel pérenne ».

Préserver la confiance et protéger les emplois

 

Une tâche qui n’a rien d’évident dans un contexte marqué par la montée des populismes, l’accroissement des inégalités et le risque toujours plus élevé de voir éclater, sous l’impulsion du président américain, « une guerre réglementaire dans le domaine financier qui ferait pour principale victime la croissance de l’économie mondiale », comme le craint Olivier Pastré.

Or, c’est probablement là que de nouvelles leçons pourraient être tirées de la crise des subprimes. Alors que la faillite de Lehman Brothers menaçait d’entraîner l’ensemble du système bancaire, Nicolas Sarkozy « a considéré que son rôle était de protéger les économies des Français, et de ne pas laisser la panique s’installer. Il a alors utilisé l’arme massive de la garantie de l’État pour protéger nos banques de la spéculation. Et cela a marché », souligne René Ricol, conseiller en matière de comptabilité et de stratégie financière et mandaté, en septembre 2008, pour monter une mission de réflexion et de formulation de propositions. A l’époque, Nicolas Sarkozy avait également « mis en place un processus de défense des entreprises et de l’emploi, car le contexte était éminemment récessif », ajoute René Ricol en référence à la Médiation du crédit, une institution créée par le chef de l’Etat afin de veiller au respect des engagements pris par les banques en contrepartie des mesures de soutien dont elles bénéficiaient.

Pour René Ricol, la morale est simple et toujours d’actualité : la réglementation, qui doit se faire de manière non dogmatique, doit surtout préserver la confiance et protéger les emplois.

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