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Les approximations d’Emmanuel Marill sur la professionnalisation d’Airbnb

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Les approximations d’Emmanuel Marill sur la professionnalisation d’Airbnb

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Emmanuel Marill, le DG d’Airbnb France, affirme que la professionnalisation d’Airbnb demeure un fantasme. Une enquête coordonnée de plusieurs quotidiens européens prouve, chiffres à l’appui, que la plateforme génère pourtant un business très rentable grâce aux multipropriétaires, nombreux à y louer leurs biens.

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Pour palier les dysfonctionnements causés par son succès mondial, Airbnb a vu son activité encadrée dans de nombreuses métropoles européennes et américaines, qui ont réduit la limite de nuitées à 120, 90 voire 60 par an. En France, un récent décret autorise également les villes de plus de 200 000 habitants ainsi que les communes de la proche banlieue parisienne à imposer aux propriétaires de s’immatriculer auprès des autorités. Le but : faire la chasse aux locations illégales et à la professionnalisation déguisée de l’économie collaborative. Car la part de multipropriétaires louant leurs biens sur la plateforme est loin d’être aussi marginale que veut bien l’admettre Emmanuel Marill, directeur général d’Airbnb France et Belgique, dans une récente interview au Monde. D’après lui, plus de 90 % des hébergeurs sur Airbnb seraient des particuliers ne possédant qu’un seul logement qu’ils loueraient seulement 26 nuits par an (33 à Paris) pour un revenu annuel moyen de 2 100 euros (2 600 à Paris). Or le marché « profiterait surtout aux gros loueurs », selon une enquête menée conjointement par Les Décodeurs et plusieurs rédactions européennes sur plus d’un tiers (36 %) des 400 000 annonces Airbnb publiées en France.

Les annonces pour des biens loués moins de 120 jours par an par des propriétaires uniques ne représenteraient que 79,46 % du total, d’après les enquêteurs. 17,8 % d’entre elles proviendraient de propriétaires multiples, le reste étant proposé à la location au-delà de la limite annuelle. Si le revenu mensuel médian des utilisateurs classiques s’élève bien à 175 euros (217 à Paris), il atteindrait en revanche la bagatelle de 1 530,29 euros pour les logements loués plus de 120 jours, et même 2 272,38 euros pour ceux loués plus de 80 % de l’année. Preuve que ces derniers tirent de la plateforme un profit correspondant à une activité professionnelle à plein temps, voire largement supérieure au salaire moyen des Français.

 

Un 13e mois à 25 000 euros ?

Dans cette moyenne, une minorité génère même des revenus dignes de PME, contrairement « au fantasme de la professionnalisation » dénoncé par le patron d’Airbnb en France et en Belgique. « Il y a, c’est exact, des professionnels, des hôteliers qui y viennent chercher des clients, mais cela reste marginal », assure Emmanuel Marill, qui refuse toutefois de révéler le chiffre d’affaires du groupe. Et pour cause : si Airbnb prétend vouloir conserver l’esprit initial d’entraide entre particuliers, « une sorte de 13e mois permettant de faire face à leurs charges d’immeuble » selon l’ancien consultant chez Groupon, Facebook et Instagram, ce sont bien les hébergeurs professionnels et semi-professionnels qui rapportent le plus à l’entreprise, rémunérée à hauteur de 10 à 20 % des transactions.

D’après l’enquête des grands quotidiens européens, 14 % des propriétaires inscrits sur la plateforme publieraient plus de 36 % des annonces à Bruxelles. Ces multipropriétaires peuvent toucher jusqu’à 3 000 euros mensuels pour ceux possédant entre deux et cinq studios, et jusqu’à 25 000 euros par mois pour ceux possédant plus de 20 appartements. Parmi eux, beaucoup joueraient avec la réglementation puisque seuls 16 % des gérants de six à 20 logements se déclarent non-professionnels (ce chiffre monte toutefois à 54,05 % pour ceux proposant plus de 20 logements entiers). En couvrant de son silence ce flou statutaire, Emmanuel Marill préservent la manne financière considérable que ces multipropriétaires représentent pour son employeur.

La plateforme va même jusqu’à mettre en avant leurs annonces sur son moteur de recherche, sous prétexte que « les voyageurs ont besoin de savoir rapidement si la location est disponible ». L’amateurisme n’a décidément plus sa place sur Airbnb.